Intronisée, dimanche 13 mai, ministre en chef de l'Uttar Pradesh, Mayawati Kumari va cette fois diriger seule cet Etat de 180 millions d'habitants. La victoire absolue remportée aux élections provinciales par son parti, le Bahujan Samaj Party (BSP), qui représente les dalits (intouchables), est une première, depuis seize ans, dans cet Etat du nord de l'Inde où la politique se joue encore par les castes.
À 51 ans, cette institutrice élevée en politique par le fondateur du BSP, Kanshi Ram, a surclassé ses rivaux avec lesquels elle avait dû composer lors de ses trois précédents règnes.
La défaite risque d'être particulièrement amère pour Rahul Gandhi, étoile montante du parti du Congrès et héritier de la dynastie Nehru-Gandhi, qui avait fait campagne sans relâche pour tenter de redonner vie à sa formation. Autre grand perdant, le Bharatiya Janata Party (BJP, nationaliste hindou) qui semble avoir perdu le vote traditionnel des brahmanes, la caste supérieure. Ministre en chef sortant, Mulayam Singh Yadav, du Samajwadi Party (socialiste), a vite reconnu sa défaite.
Mme Mayawati doit son succès à une campagne qui n'a pas été menée exclusivement en faveur des dalits. Défiant les prévisions de nombreux observateurs, elle a réussi à former une puissante alliance entre les dalits et les brahmanes.
" La victoire de Mayawati a le potentiel pour déclencher une nouvelle révolution sociale en Inde, a commenté l'analyste politique Chandra Bhan Prasad. Tandis qu'ils prêtaient serment, tous les ministres, y compris ses collègues brahmanes, se sont inclinés aux pieds de Mayawati. Le message est clair et fort. Avec le brahmane comme nouvel ami, le dalit peut marcher la tête haute. "
Accusée de corruption
Mme Mayawati, dont les mandats précédents n'ont pas laissé que de bons souvenirs, devra toutefois faire preuve de beaucoup de poigne et de compétence pour faire sortir cet Etat du sous-développement qui le caractérise.
" Nous ferons de l'Uttar Pradesh un Etat libéré de l'injustice et du crime ", a-t-elle promis. Vaste tâche dans un Etat où jusqu'à trente ministres ont été poursuivis de meurtres, viols ou vols. Mme Mayawati a, elle-même, à plusieurs reprises, été accusée de corruption. En 2003, son gouvernement était tombé à la suite d'une controverse liée à l'approbation par son cabinet d'un complexe touristique de 40 millions de dollars près du Taj Mahal.
Françoise Chipau (Source : Le Monde 17 mai 2007)